PACS et mariage
Article de Cécile Jelsch, Notaire à Besançon – droit patrimonial de la famille et successions
Le droit ne reconnaît que deux unions auxquelles il va attacher des conséquences juridiques différentes : le PACS, et le mariage.
Ainsi, les concubins sont ignorés par le droit ; ils sont traités comme de simples étrangers l’un vis-à-vis de l’autre, tant pour la fiscalité qui serait de 60% en matière successorale que pour les droits qu’ils recueilleraient en cas de décès ou de séparation, lesquels sont totalement inexistants.
Alors quels sont les effets de ces deux unions, quelles sont leurs différences et quel régime privilégier ?
- 1°) Le PACS et ses effets
Rappelons le, le PACS avait initialement été créé en 1999 pour permettre à deux personnes de même sexe de disposer d’un cadre institutionnel car le mariage leur était alors impossible. Depuis, la loi sur le mariage pour tous a été promulguée le 17 mai 2013.
Le PACS a, entre-temps, trouvé sa place dans le paysage du couple en France.
Beaucoup l’utilisent comme une forme d’union intermédiaire, un préalable au mariage, une phase de test de l’union dans un cadre juridique ou encore comme une solution pérenne quand le mariage effraie.
Sa flexibilité (dans sa conclusion comme dans sa rupture) et le fait qu’il soit dénué de tout aspect religieux, de normes sociale et familiale contribuent à son succès.
Mais quels sont donc réellement ses effets ?
Il existe deux régimes de PACS : l’indivision et la séparation de biens.
Le régime de l’indivision peut être un régime très contraignant car les biens acquis par le ou les partenaires, à partir de la conclusion du PACS, sont présumés appartenir aux partenaires chacun pour moitié.
Le régime de la séparation de biens est plus souple, il permet de choisir qui sera propriétaire des biens acquis et dans quelles proportions. C’est le régime que je conseille sauf rares exceptions.
Attention, en cas de décès, la seule conclusion du PACS, et quel que soit le régime choisi, n’ouvre aucun droit au partenaire, s’il n’existe pas de testament à son profit. En l’absence de testament, il n’hériterait de rien. Ce point est essentiel.
Votre notaire devra alors vous guider pour établir le testament qui saura protéger votre partenaire notamment dans son lieu de vie, qu’il vienne en concours avec des enfants, communs ou non, ou, en l’absence d’enfant avec les père et mère et/ou frères et sœurs du défunt.
Prenons un exemple :
Laura et Martin sont pacsés sous le régime de la séparation de biens. Ils ont acheté leur résidence principale et ont décidé, en raison de leurs efforts respectifs de financement, de l’acheter à hauteur de 60% pour Laura et 40% pour Martin.
Laura décède, ils n’ont pas d’enfant et n’ont pas fait de testament.
Laura laisse donc comme héritière sa mère, qui héritera des 60% de la résidence principale de sa fille.
Martin et la mère de Laura seront en indivision… heureusement l’ambiance est bonne !
Même exemple sauf que Laura décède et laisse deux enfants mineurs issus d’une précédente union. Ses héritiers seront ses enfants mineurs et les 60% de la maison, dont ils seront désormais propriétaires, seront gérés… par leur père jusqu’à leur majorité… l’ambiance avec Martin est nettement moins bonne !
Il est important de préciser que si un testament est prévu à son profit, le partenaire ne paiera pas de droit de succession.
De plus, le PACS :
– Oblige à une vie commune, à une aide financière et à une assistance réciproque,
– Entraine une solidarité pour les dettes contractées par le partenaire pour les besoins de la vie courante, sauf quand elles sont manifestement excessives,
– N’ouvre pas droit à la pension de réversion (partie de la retraite de la personne décédée reversée au conjoint),
– N’impose pas d’obligation alimentaire à l’égard des parents de votre partenaire,
– Implique une imposition commune (impôts sur le revenu et impôt sur la fortune immobilière) sauf exception,
– Peut avoir des impacts sur certaines aides sociales (allocation de veuvage, …).
- 2°) Le mariage et ses effets
Doit-on encore présenter le mariage ? oui je le pense. Je croise encore beaucoup (trop) de clients avec des idées toutes faites ou erronées sur le mariage.
Alors quelques mots sur ces effets:
D’abord en ce qui concerne le régime qui s’applique à l’union, on parle de régime matrimonial.
Il en existe de multiples mais parmi les plus connus et les plus utilisés, on peut citer :
– Le régime légal de communauté, qui s’appliquera à défaut de contrat de mariage. Je rappelle que le contrat, si vous souhaitez en établir un, doit être obligatoirement reçu par un notaire avant la célébration de l’union.
– La séparation de biens,
– La participation aux acquêts,
– La communauté universelle.
Chacun de ces régimes peut s’aménager, il est possible de faire du « sur-mesure » et d’adapter au mieux votre contrat de mariage à votre situation.
De plus, vous pouvez également changer de régime en cours d’union.
Aussi, il est indispensable, à mon sens, de rencontrer un notaire, avant votre union, afin d’évoquer avec lui ce que la loi prévoit dans votre situation, et si cela n’est pas adaptée à celle-ci, de faire un choix différent.
Quelques mots sur le régime légal : c’est le régime qui s’applique, à défaut de choix de votre part, et qui reste aujourd’hui le régime majoritaire en France.
Dans ce régime, l’ensemble des biens dont vous ferez l’acquisition du jour de votre mariage jusqu’au jour de votre divorce, ou de votre décès, appartiendra à votre communauté. Ne resteront à votre nom que les biens dont vous serez déjà propriétaire au jour de votre mariage ou ceux qui vous reviendront par succession ou par donation au cours de votre mariage.
Voilà quelques points, non exhaustifs, qui doivent attirer votre attention, si vous êtes tentés par ce régime ou déjà concernés par celui-ci :
– Vos salaires sont ou seront communs (même s’ils sont versés sur un compte à votre nom),
– Les fruits et revenus de vos biens propres sont ou seront communs.
Prenons deux exemples pour illustrer ce dernier propos :
Premier exemple : Eve s’est mariée sans contrat et a acheté, au cours de son union, sa résidence principale. Son conjoint, Eric, avait un bon salaire mais il s’est découvert une passion pour les abeilles ; il a donc changé de profession, il est désormais apiculteur et les rentrées d’argent sont, depuis, plus aléatoires.
Eve a dû reprendre un temps plein et assume, tous les mois, la quasi-totalité des échéances de prêt. Cette situation dure depuis maintenant presque 15 ans.
Eve envisage de divorcer et espère bien pouvoir obtenir un avantage de cette situation. Après tout, c’est bien elle qui rembourse seule l’emprunt de la maison depuis 15 ans.
Elle ressort désespérée de son entretien avec son notaire ; ce dernier vient de lui expliquer qu’elle n’aura droit à rien car ses salaires sont communs. Eric aura droit à la moitié de la maison, comme elle.
2ème exemple : Sophie a hérité d’une maison de ses parents qu’elle a mise en location. Elle a souscrit un prêt pour procéder à quelques travaux de rafraîchissement et pour refaire le toit.
Elle est mariée avec Sébastien, sans contrat. Aujourd’hui, elle a rendez-vous avec son notaire car Sébastien vient de décéder, elle angoisse un peu parce que Sébastien avait un enfant d’une précédente union. Cet enfant n’a jamais accepté que son père se remarie avec Sophie.
En ressortant, elle est désabusée et perdue, elle ne sait pas si elle a bien compris, son notaire vient de lui expliquer qu’elle doit lui apporter les éléments afin qu’il puisse calculer ce qu’elle devra à la succession de Sébastien pour le prêt qu’elle a remboursé avec les loyers de la maison que ses parents lui avait laissé…
Je rencontre ces situations tous les jours, elles sont délicates à gérer.
Depuis les années 2006, en cas de décès, le conjoint est bien mieux protégé qu’avant. Sa protection est un effet du mariage, il n’y a pas besoin d’établir automatiquement un testament. De plus, il est, lui aussi, complètement exonéré de droit de succession.
La donation entre époux reste intéressante et permet de mieux protéger encore son conjoint en lui offrant plus de choix.
De même, l’absence d’enfant ou la présence d’enfant qui ne sont pas tous issus de la même union, doit vous amener à consulter votre notaire.
- 3°) Les différences
Le mariage a un atout principal sur le PACS, il est beaucoup plus protecteur pour le conjoint, en cas de décès. Beaucoup craignent le mariage car le divorce effraie mais ce risque, même s’il est de plus en plus fréquent, est éventuel ; le décès quant à lui est, malheureusement, certain !
Le PACS se heurte à la réserve des enfants. Si le partenaire reçoit une part trop importante du patrimoine du défunt, il doit indemniser les enfants pour reconstituer leur part et, ainsi, ne plus porter atteinte à leur réserve.
Le mariage offre une plus grande souplesse sur cette question. Il permet, notamment, d’accorder des droits en usufruit au conjoint, lesquels peuvent, alors, porter sur la réserve des enfants, sans pour autant que les enfants ne soient lésés. Cette question est encore plus fondamentale quand il existe des enfants d’unions différentes.
- 4°) Alors Maître, PACS ou mariage ?
Assurément, pour la protection du conjoint, mariage !
Cependant, à chaque situation sa réponse. Ces deux régimes sont de plus en plus similaires, mais des différences notoires persistent.
N’hésitez pas à pousser la porte de nos études et venez étudier avec nous la solution faite pour vous.